Prise d’acte de la rupture d’un contrat de travail d’une salariée protégée.

Une salariée engage une action en justice en résiliation de son contrat de travail aux torts de son employeur, estimant que ce dernier a unilatéralement modifié son contrat de travail en l’affectant sans son accord à un nouveau poste de travail.

Alors que la procédure prud’homale est toujours en cours, la salariée rompt un an plus tard son contrat de travail, par une prise d’acte aux torts de l’employeur.

En effet, dès lors que la juridiction n’a pas statué sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, la salariée toujours en poste, peut prendre acte de sa rupture, sous certaines conditions, ce qui rompt immédiatement le contrat de travail et rend sans objet la demande de résiliation judiciaire.

La Cour de cassation reconnaît que l’employeur avait bien modifié le contrat de travail sans l’accord de la salariée, ce qui constituait un manquement de sa part à ses obligations contractuelles d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail, justifiant la prise d’acte.

Entre temps, la salariée avait obtenu le statut protecteur de représentante de la section syndicale au jour de la prise d’acte, de sorte que son licenciement est déclaré nul, avec toutes les conséquences financières que cela engendre, y compris le risque de réintégration.

La Cour de cassation considère logiquement que le statut protecteur de la salariée acquis après la modification de poste, doit lui bénéficier au jour de la prise d’acte (Soc. 17 janv. 2024, n°22-16.095).

La décision est très sévère pour l’employeur, alors même qu’une prise d’acte est censée sanctionner un manquement d’une gravité telle qu’il empêche la poursuite du contrat de travail.

Or, en l’espèce, la salariée avait pris acte de la rupture plus de 18 mois après la nouvelle affectation, sans invoquer d’autres manquements de son employeur.

On voit mal comment dès lors justifier que ce manquement aurait été d’une gravité telle qu’il aurait empêché la poursuite du contrat de travail, lequel s’était poursuivi 18 mois avant la prise d’acte.

Il s’agit assurément d’un arrêt d’espèce, lequel n’a pas été publié au Bulletin.

 

 

Par Laurent Meillet
Le 25 Avril 2024